Fontevraud et son Abbaye Royale
C'est vers 1045, à Arbrissel près de Rennes, à deux pas de
l'Anjou, que naquit Robert. A la mort de son père curé du village, Robert
prend sa place à la cure d'Arbrissel. Et, naturellement doit prendre femme,
car en ce temps, la coutume voulait que les prêtres se marient, célèbrent
leurs noces et procréent fils et fille, à qui, à leur mort, ils laissaient
par droit héréditaire, leur église. Pour Robert, il entre dans cet ordre au
moment où celui ci commence à perdre ses repères. Il se rend à Paris pour y
continuer ses études, et entre à l'université, simoniaque (1) et nicolaïte
(2). Mais lorsqu'il retourne sur sa terre natale, c'est avec un tout autre
esprit. Durant son séjour à Paris, Robert avait fait preuve de zèle en ce
qui concerne ses études et de sévérité envers ses mœurs. Depuis l'an Mil la
chrétienté guidée par le pape Sylvestre II, a entamé une puissante réforme,
c'est en 1073, avec l'élection de Grégoire VII que celle ci va s'engager.
Dès 1074 le synode romain proclame la déchéance des prêtres simoniaques et
nicolaïtes, invite les fidèles à fuir les églises des prêtres réfractaires.
De son coté, la même année, le synode de Paris refuse le célibat des prêtres
qu'il juge contraire à la condition humaine. Robert va se rendre compte très
vite qu'il a été conçu dans le péché et que lui même a péché de plusieurs
manières. Aussi décide t-il de propager cette réforme au plus grand nombre.
Il va être aidé par l'évêque de Rennes Sylvestre de la Guerche qui lui
demande de l'aider dans cette entreprise. Robert redressera l'église de
Rennes et dirigera le diocèse durant quatre années. Son oeuvre était de
libérer l'église de l'emprise des laïcs d'imposer le célibat aux prêtres et
de supprimer la polygamie. Sujet épineux qui n'amènera pas à Robert que des
amis. Suite à la proclamation, en 1074, du synode romain, des affrontements
terribles ont lieu entre réformateurs et les opposants à la réforme. Robert
ne parvient pas à ramener les brebis égarées au sein de l'église. Il décide
donc de reprendre ses études à Angers. Deux ans plus tard, en 1095, Robert
prend la route de l'errance pour vivre en ermite, car dans les mémoires
c'est sous ses traits qu'il est resté. Il arrive en forêt de Craon aux
confins de l'Anjou et de la Bretagne en s'imposant une discipline de vie
dure et austère. Le jour il prêche la parole de Dieu, la nuit il se retire
en forêt pour le prier. Le nombre de ses fidèles est tel qu'il décide de
créer sa communauté religieuse en forêt de Craon. Il fonde à la Roë (terre
cédée à Robert par le seigneur Renaud de Craon) une congrégation de
chanoines. Robert songe à partir, car il se rend compte que dans sa
communauté il prêche des convertis. Il part donc de la Roë pour prêcher la
parole de Dieu et arrive à Fontevraud en 1101, suivi de sa troupe formée de
brigands, de jeunes filles, de grandes dames, de paysans et de lépreux. Les
pauvres du Christ s'installent dans un camp retranché. Ce point de
chute n'est pas très loin de Candes Saint Martin et de Montsoreau. La
communauté va se trouver sous la protection de Pierre II évêque de Poitiers.
Robert entreprend de séparer les hommes des femmes. Les femmes se consacrent
à la prière dans un lieu clôturé. De leur côté les hommes s'occupent à la
vie active. Robert était loin de se douter de ce qu'il adviendrait. En effet
les fidèles affluèrent de plus en plus nombreux et de toutes
conditions. Robert s'aperçut bien vite qu'il fallait
les nourrir. Le petit coin de paradis qu'il avait trouvé n'était pas encore
défriché ni labouré, ni semé, ni moissonné. Heureusement pour Robert et ses
pauvres, les villages voisins leur font parvenir du pain. Mais la communauté
grandit et n'a bientôt plus de quoi se nourrir. Robert décide de sortir et
de parler. Son pouvoir de persuasion est tel qu'au suivent les vêtements et
l'argent. Suite à cette rentrée d'argent, on remplace les huttes par des
maisons de pierre et on agrandit l'oratoire. Les hommes sont séparés des
femmes. Le groupe le plus important est placé dans le grand cloître. Robert
d'Arbrissel règne sur sa communauté reconnue par les ecclésiastiques et
laïcs. Robert commence par la construction de l'église abbatiale, celle ci
presque aussi grande qu'une cathédrale doit contenir beaucoup de monde. Les
prêtres et servants sont dans le Chœur là où se trouve l'autel. Les moniales
occupent une grande partie de la nef au centre de laquelle sont disposés
quatre gisants. Celui de Henri II Plantagenêt comte d'Anjou et roi
d'Angleterre, de son épouse Aliénor d'Aquitaine reine d'Angleterre, Richard
Cœur de Lion leur fils, et Isabelle d'Angoulême épouse de Jean Terre fils
d'Henri II et d'Alienor. Bien après son décès en 1116, on peut voir surgir
une immense abbaye. Elle est constituée du grand Moutier (3) construit
autour de l'abbatiale. Les salles sont vastes car les moniales sont très
nombreuses. Il y a trois dortoirs dans lesquels on y trouve celles qui
travaillent au Prieuré (4) de La Madeleine, celles qui s'occupent des
lépreux au prieuré Saint Lazare, celles qui soignent les malades au prieuré
Saint Benoît. Saint Jean de l'Habit (5) abrite les frères, certains sont
prêtres ils sont seuls autorisés à célébrer la messe et à donner les
sacrements. Les moniales et les pères sont séparés par une clôture. Robert
d'Arbrissel a ainsi crée un ordre double et qui plus est sera dirigé
par une Abbesse (6). La révolution marquera la fin de cette abbaye. En 1804,
Napoléon transforme l'abbaye en prison. Après dix années de travaux,
arrivent les premiers détenus. C'est en 1963 que la prison est fermée,
l'abbaye est consacrée au patrimoine et à la culture. Commence alors de
gigantesques travaux de restauration.
1 Qui vend ou achète à prix temporel une
chose spirituelle(ou assimilable à une chose spirituelle) |
Dernière Modification 05/05/18 © Histoire de France 1996
|