Laboratoire de chimie

 

    La chimie est une vaste science qui englobe à la fois l'étude de la matière sous toutes ses formes, et celle de ses transformations.
    Un laboratoire au XVIIIe siècle : des boisseaux, des creusets, des alambics. C'est encore une chimie des mélanges et des amalgames.
    Autrefois, la science n'était que qualitative et, comme on ne pratiquait pas la mesure, un matériel relativement simple suffisait. Puis, le volume des connaissances augmentant ainsi que l'exigence de rigueur des savants, la chimie devint quantitative vers le milieu du XVIIIe siècle, surtout grâce aux travaux de Lavoisier qui introduisit l'usage systématique de la balance : il s'agissait de déterminer les masses des divers corps réagissant et celles des corps formés au cours de ces réactions chimiques. Ce besoin de précision ne fit que croître, portant non seulement sur les masses, mais sur de nombreuses autres propriétés. Tout cela exige un matériel considérable et onéreux, en même temps que des installations spacieuses. L'ensemble de ces installations constitue le laboratoire de chimie, un établissement souvent complexe et impressionnant.
    On peut classer les laboratoires en plusieurs catégories, selon la nature des travaux que l'on y poursuit. On distinguera les laboratoires de recherche, les laboratoires d'analyse et les laboratoires d'essais et de contrôle.
    La recherche ne constitue pas à provoquer des transformations ou des réactions quelconques, pour "voir ce que cela donne". On laisse au hasard le plus petit rôle possible. Pour cela, on suit en général une voie suggérée par des études théoriques et l'on s'attache surtout à déterminer avec soin et avec précision tous les facteurs qui peuvent intervenir.
    On veut savoir, par exemple, quelles sont les combinaisons possibles, à haute température, entre deux corps : l'oxyde de césium et l'anhydride borique. La première opération consiste à préparer ces corps, à partir des produits commerciaux, avec le plus haut degré possible de pureté. Cela demande déjà un grand nombre d'opérations dont, notamment, une électrolyse qui exige elle-même une préparation spéciale. Après cela, il faut vérifier la pureté des produits obtenus; ce sera ici par analyse aux rayons X.
    Une fois assuré de la pureté des produits, on peut commencer la recherche proprement dite. Il faut, bien entendu, choisir d'abord une méthode d'étude. Dans la circonstance, ce sera l'analyse thermique : on constitue plusieurs mélanges, on détermine à chaque instant la température. On fait de même au cours du refroidissement. On dispose, pour ces opérations, d'un appareil qui enregistre automatiquement la courbe de température.
    Quand les résultats sont obtenus pour tous les mélanges, on en tire un tableau d'ensemble qui peut se traduire par un nouveau graphique. Intervient alors une phase de réflexion et d'interprétation des résultats, prenant appui sur des calculs théoriques. C'est à ce stade que la découverte peut venir couronner le minutieux travail accompli. On trouve ici, en effet, un certain nombre de composés nouveaux qui se sont formés à haute température. Tous les moyens seront ensuite mis en œuvre pour confirmer les résultats ou les contredire.
    Il s'agissait ici d'une recherche fondamentale, c'est-à-dire sans préoccupation directement utilitaire. Par opposition, la recherche appliquée est menée dans un but pratique précis. Mais les méthodes et les moyens nécessaires sont les mêmes. Par exemple, dans l'industrie céramique, il existe, à côté des ateliers de fabrication, des laboratoires de recherche où l'on fait aussi, entre autres, de l'analyse thermique, dans le but de mieux connaître le comportement des céramiques sous différentes conditions, en particulier à température élevée. On opère de façon tout aussi méticuleuse et avec la même rigueur que dans la recherche fondamentale. Dans les laboratoires d'analyse, on recherche simplement la nature des constituants et leurs proportions dans un produit à analyser.
    Dans certains laboratoires, on teste les produits qu'on a fabriqués en déterminant leurs caractères physiques et chimiques. On contrôle ainsi les produits pharmaceutiques, les produits alimentaires, les matériaux, etc. Prenons l'exemple de l'industrie métallurgique. Au cours même de la fabrication d'un métal ou d'un alliage, des prises d'essai sont faites et analysées aussitôt, ce qui permet de modifier s'il y a lieu le déroulement de la fabrication, d'introduire une certaine quantité d'un constituant, et, au total, de contrôler l'exacte qualité de l'alliage obtenu à chaque coulée. D'un autre côté, des travaux sont poursuivis en permanence pour mieux connaître les propriétés des métaux et des alliages, en élaborer de nouveaux qui présenteront des caractéristiques mécaniques, thermiques, électriques, magnétiques, chimiques permettant de satisfaire certains besoins industriels. Le laboratoire de chimie a donc, au total, un triple rôle de recherche, d'analyse, d'essai et contrôle.
    Dès le lycée, des élèves vont dans des laboratoires pour refaire les expériences que des savants ont réalisées avant eux.
    Comment est organisé un laboratoire? Outre les nombreux produits chimiques dont il a besoin, un laboratoire emploie très fréquemment des gaz fournis par l'industrie en bouteilles métalliques où le gaz est comprimé jusqu'à être liquéfié : tubes d'oxygène, d'hydrogène, de dioxyde de carbone, d'argon, bonbonnes d'air liquide.
    Quant à l'installation proprement dite, elle est principalement constituées de tables, cimentées au sol en général, munies de prises d'eau, de gaz, d'électricité. Sur ces tables communément appelées paillasses, où à même le sol pour les gros appareils, sont disposés les montages d'expériences en cours. Ce peut être un montage de distillation, tout en verre, ou un montage pour l'étude des radicaux libres (formes passagères d'associations d'atomes), impressionnant assemblage de tubulures de verre allant dans tous les sens, avec pompes à vide, pièges à air liquide, dispositifs d'accélération d'ions et de recueil, circuit complexe sur lequel sont branchés de nombreux appareils de mesure.
    Le verre est très fréquemment employé : tubes de tailles diverses, cristallisoirs, vases de formes variées, réfrigérants, appareils de forme plus ou moins compliquée fabriqués spécialement pour une expérience déterminée. On peut aussi observer de grandes boîtes d'isolement à parois transparentes, d'environ un mètre de côté, munies sur une face d'ouvertures complètement obturées par des gants : en introduisant les mains dans ceux-ci, on peut manipuler des produits placés à l'intérieur de la boîte, et que le contact de l'air risquerait de modifier; un gaz inerte (azote, argon, ou un autre gaz, selon les cas) emplit la boîte. Dans une pièce spéciale, des balances de précision enfermées dans une cage de verre : c'est la salle des balances, maintenue à température constante, à l'abri des courants d'air et des vapeurs nocives.
    Il peut y avoir de grands appareils enregistreurs, des spectroscopes ou des spectrographes à lumière visible, ou infrarouge, ou ultraviolette, ou à rayons X; des appareils d'étude de la résonance magnétique nucléaire, des photomètres, des chromatographes, sans parler d'appareils plus simples tels que baromètres, manomètres, microscopes, pompes à vide, thermocouples, fours, étuves, calorimètres, montages électriques, installations photographiques.
    N'oublions pas enfin les bureaux de dessin, la bibliothèque, les fichiers de documentation, et surtout la salle de calcul où clignote le "terminal" d'un ordinateur, cerveau du laboratoire.


Dernière Modification   01/01/17

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