Civilisation romaine l'histoire

     Au VIIIe siècle av. J.-C., alors que l'Egypte est affaiblie, que la Grèce, agitée par des guerres civiles, se lance sur la Méditerranée et fonde ses premières colonies, un petit village se crée au centre de l'Italie, Rome, qui va partir à la conquête du bassin méditerranéen, qu'il réorganisera totalement.
    La Louve du Capitole que l'on attribue à un artiste étrusque du VIe siècle av. J.-C., fut transférée à Rome où elle devint le symbole de la ville. Le groupe des jumeaux, tel qu'on peut le voir, date de la Renaissance, mais il existait sans doute dès l'origine.
    L'Italie, encore plus que la Grèce, fut un carrefour de peuples. Les Ligures s'y installèrent à une date indéterminée, dans les massifs montagneux, rejoints par les Samnites, peuples indo-européens qui envahirent la péninsule dans la deuxième moitié du IIe millénaire. On désigne sous le nom d' "Italiotes" ces premiers peuples, ainsi que les Sabins et Latins qui s'installèrent dans quelques plaines côtières marécageuses comme le Latium. Surtout bergers et guerriers, ils défendaient âprement leurs terres.
    Deux grands foyers de civilisation se développent alors, l'un au Sud à partir des colonies grecques, l'autre en Toscane où dominent les Etrusques dont l'origine demeure encore mystérieuse (origine asiatique sans doute) et l'écriture indéchiffrable. Les premiers temps de l'histoire de Rome n'ont été connus pendant longtemps que par des documents iconographiques ou des récits plus ou moins légendaires de poètes et historiens latins, comme Tite-Live.
    La légende rapporte que le Troyen Enée débarqua dans le Latium après la chute de Troie. Il épousa la fille du roi local et leur fils fonda la ville d'Albe. Deux de ses descendants, Romulus et Remus, abandonnés sur le Tibre pour être écartés du trône, furent sauvés par une louve qui les nourrit comme ses enfants.
    Sur la carte de gauche, le territoire de Rome avant (zone hachurée) et après les longues guerres samnites (343-291 av. J.-C.).
    A droite, les possessions respectives de Rome et de Carthage à la veille de la première guerre punique (264-241 av. J.-C.).

    En 753 av. J.-C., Romulus fonde la ville qui porte son nom, après avoir tué son frère. Il attire dans la ville bergers et pillards, leur donnant comme épouses des Sabines élevées au cours d'une fête. Dès lors, la ville est gouvernée alternativement par des rois latins et sabins avant de l'être par des rois étrusques (au VIe siècle av. J.-C.).
    Le site de la Rome antique :
1. la Rome "carrée", village fortifié construit sur le mont Palatin
2. L'enceinte de Rome à la fin de la royauté
3. L'île Tibérine
4. Le pont Sublicius
5. La via Nomentana
6. La via Appia
7. La via Flaminia
8. Le Tibre.

    Les sciences actuelles (archéologie, ethnologie...) permettent de mieux connaître la réalité historique. Des villages latins et sabins, organisés en confédération, vivant d'élevage et de culture, occupent le site des sept collines de Rome dès le Xe siècle av. J.-C. Au VIIe siècle av. J.-C., les Etrusques envahissent le Latium et réunissent les villages en une vraie ville avec des temples, une place publique, un mur d'enceinte, un égout.
    Ils transmettent aux Romains l'art de construire les voûtes, les murailles, d'assécher les marais, et leurs coutumes religieuses. A la fin du VIe siècle av. J.-C., ils sont battus par les Grecs de Campanie tandis que le peuple latin se révolte, les chasse et fonde la république.
    La société romaine de ces premiers siècles est inégalitaire. La patriciens (du mot pater, chef de famille) descendants des fondateurs de Rome, sont divisés en gentes, ou clans, issus d'un même ancêtre à qui ils rendent un culte. Ils portent en général trois noms : le praenomen correspond au prénom actuel, le nomen, équivalant au nom de famille, indique la gens, et le cognomen, sorte de surnom, utilise une caractéristique physique ou morale (scaurus : pied-bot; Cicéron, de cicer : pois chiche).
    A gauche : les possession de Rome en 60 av. J.-C. (premier triumvirat). Délimités par une mince ligne rouge, les territoires sous l'influence de Rome.
A droite: l'extension de l'empire romain d'Auguste à la mort de Trajan (117 ap. J.-C.)
1. Nouvelles conquêtes
2. Provinces impériales
3. Etats vassaux
4. Provinces sénatoriales.

    Le père a droit de vie et de mort sur tous les membres de sa famille. La mère s'occupe des affaires domestiques, de ses enfants et des esclaves. Les patriciens sont riches en terre, ils peuvent ainsi entretenir des "clients", anciens esclaves ou pauvres gens qui bénéficient de leur protection et leur servent d'hommes de main, en période d'élections par exemple.
    Enseignes de manipules (mains ouvertes au sommet de la hampe), encadrant sur un bas-relief, une enseigne de légion (surmontée de l'aigle aux ailes déployées). L'enseigne du milieu porte une corona muralis, distinction accordée à celui qui escaladait le premier les remparts d'une ville ennemie.
    Les plébéiens, étrangers, descendants des peuples vaincus, anciens petits paysans, pratiquent divers métiers : entre autres, ils sont artisans ou commerçants. Enfin, les esclaves assurent l'entretien des patriciens. Ils sont considérés comme des objets et ne peuvent retrouver leur liberté que s'ils sont affranchis par leur maître.
    La république, instaurée au VIe siècle, est en fait une république aristocratique dominée par les patriciens. Ils ont seuls les moyens de se procurer des armes et de participer aux guerres. Leur puissance économique et militaire est à la base de leur pouvoir politique. Les premiers siècles de la république furent marqués par une série de luttes internes menées par les plébéiens pour obtenir l'égalité juridique et politique.
    En recourant aux "sécessions" (le peuple sortait de la ville et organisait ses propres assemblées), ils obtiennent le droit d'avoir leurs représentants, les tribuns de la plèbe, qui peuvent s'opposer au vote d'une loi et garantir le sort des plébéiens, et qui bénéficient de l'inviolabilité : quiconque tentait de porter la main sur eux était passible de peine de mort.
    Ils obtiennent encore la codification des lois des Douze Tables, base du futur droit romain, la participation au Sénat et l'accès à toutes les magistratures. Pour éviter le retour au pouvoir personnel, le régime a été établi sur le partage des pouvoirs et l'équilibre entre trois organes politiques qui se contrôlent mutuellement.
    Les comices, ou assemblées du peuple, votent des lois et élisent les magistrats. En principe, elles sont l'expression de la souveraineté du peuple, en fait la prépondérance appartient aux riches. Les magistrats exercent leur charges un an, collégialement (en équipes). Le candidat doit auparavant avoir fait preuve de sa compétence et parcouru dans un ordre bien établi toute une série de grades (le cursus honorum) qui comportent des insignes et privilèges particuliers (licteurs portant des faisceaux, sièges curules).
    La première étape de ces charges était celle de questeur. Le questeur s'occupait des finances, de l'administration de la ville et de l'armée. Les édiles assuraient la police, l'entretien de la voirie, le contrôle du commerce, l'approvisionnement de la ville, la construction des routes et des édifices publics, l'organisation des jeux. Les préteurs rendaient la justice et pouvaient remplacer les consuls absents.
    Les consuls exerçaient la magistrature la plus importante. Héritiers des rois, ils cumulent le pouvoir militaire, en assurant le commandement de l'armée, et le pouvoir civil; ils convoquent et président le sénat et les comices. Ils donnent leur nom à l'armée et à l'année de leur mandat, et portent la robe ornée de pourpre (toge prétexte) comme les sénateurs.
    Les censeurs, dernier grade du cursus honorum, choisis parmi les anciens consuls, s'occupent du recensement des citoyens, de leur fortune et surveillent la moralité publique. Enfin la dictature est une magistrature exceptionnelle : en cas de danger ou d'urgence, le dictateur dispose de tous les pouvoirs.
    Esclaves affectés au service du vin. Ce bas-relief figure sur un tombeau romain édifié au IIIe siècle, à Igal, près de Trèves. Les autres bas-reliefs présentent des scènes analogues de la vie domestique.
    Le Sénat, troisième organe politique de la République romaine, était composé des chefs des familles patriciennes (d'où le nom de patres qui leur était attribué). Il existait déjà au temps des rois.. Sous la République, il comprend 300 membres recrutés parmi les anciens magistrats. Il surveille la religion nationale, les finances, l'administration du territoire public, il fixe les effectifs de l'armée, contrôle l'action des militaires, dirige la politique extérieure. Ses avis (senatus consultes) n'ont pas caractère de loi, mais sont en général suivis. Il est le principal organe du gouvernement.
    Pendant que ses institutions se mettent en place, Rome défend au Ve siècle av. J.-C. ses positions contre ses voisins. Il faut presque un siècle aux armées romaines pour arrêter les offensives des Etrusques, Eques, Volsques, Sabins, Samnites qui leur font subir l'humiliante défaite des Fourches-Caudines racontée par Tite-Live (IX.6). Ils subissent aussi les assauts des Gaulois, Celtes redoutables qui s'emparèrent de Rome à l'exception de la citadelle et laissèrent au cœur des habitants une terreur tenace.
    A partir du milieu du VIe siècle av. J.-C., les Romains prennent à leur tour l'offensive; profitant des leçons de leurs défaites antérieures, ils battent d'abord les Samnites, puis s'attaquent aux Grecs du Sud qui appellent à l'aide le roi d'Epire, Pyrrhus. Après des batailles indécises, celui-ci se retire. En un siècle (milieu du IIIe siècle av. J.-C.) l'Italie péninsulaire devient romaine.
    Contrairement à l'histoire grecque, l'unité de l'Italie se fait au profit d'une seule ville : Rome. Les peuples vaincus ont un sort d'autant plus enviable qu'ils se montrent dociles. Certains sont groupés dans des "colonies romaines" et bénéficient des mêmes droits que les Romains. Les "municipes" possèdent un droit de cité incomplet. Les "attres" ne sont pas citoyens romains. Ils sont obligés "d'avoir les mêmes ennemis que Rome". Mais tous, municipes et alliés, deviennent progressivement citoyens complets. Un remarquable réseau de voies permet aux vainqueurs d'administrer et de surveiller leurs conquêtes.
    Vers 264 av. J.-C., Rome commence à conquérir le bassin méditerranéen. Elle dispose, pour cela, d'un outil efficace : l'armée.
    L'armée romaine, comme l'armée grecque, n'est pas une armée de métier permanente. Elle ne le devient qu'au début du IIe siècle av. J.-C., sous Marius. Dès que la patrie est menacée, tous les hommes libres de 17 à 60 ans sont mobilisés, sauf les prolétaires, non possédants, qui n'ont d'autres biens que leurs enfants (proles). Des troupes auxiliaires sont recrutées parmi les alliés. Cela représente 300 à 400 000 hommes environ sous l'Empire, exceptionnellement 900 000.
    L'armée romaine est essentiellement terrestre. La marine restera toujours une faiblesse de l'équipement militaire romain. L'unité de base est la légion qui comprend sous Marius 4 200 fantassins et 300 cavaliers. Elle est commandée par le consul. Chacune est divisée en "centuries", subdivisées en manipules, qui sont dirigées par des "centurions".
    Ce sont eux qui sont "l'armée de l'armée romaine", et "la plaque tournante" de la promotion sociale pour l'armée. Plus que les consuls, ils sont doués d'une grande technicité et ils ont assuré la parfaite efficacité de l'armée.
    Celle-ci est caractérisée par sa discipline implacable. Les généraux ont droit de vie et de mort sur leurs soldats. En cas de recul devant l'ennemi, l'armée est décimée : un homme sur dix tiré au sort est décapité devant tous. Les récompenses sont nombreuses, butin, décorations, et surtout le triomphe, procession solennelle du général vainqueur jusqu'au temple de Jupiter sur le Capitole.
    L'organisation de l'armée est remarquable. Les divers éléments de l'armement ont été astucieusement empruntés par les Romains à leurs adversaires (épée courte espagnole, cotte de mailles et boucliers gaulois...). Le légionnaire, lourdement chargé (40 kg) est capable de faire 25 km par jour, car il subit un entraînement poussé. A chaque étape, il doit construire un camp fortifié suivant un plan rigoureux, toujours identique.
    L'ordre de bataille comprend 3 lignes; la première est formée des plus jeunes, les "hastates", puis viennent les "principes", plus âgés. Tous lancent le javelot avant de combattre corps à corps. La dernière ligne des "triaris", ou vétérans, sert de réserve. La tactique est très variée selon les terrains, les ennemis, les moments du combat. Les légionnaires sont fort expérimentés dans l'art des sièges et des fortifications. Des travaux de fortification considérables, en effet, furent effectués sous l'Empire en vue de protéger les frontières, sur des centaines de kilomètres : "cimes" de Grande-Bretagne, du Rhin, de Numidie, de l'Euphrate.
    La conquête du bassin méditerranéen fut très rapide par rapport à celle de l'Italie (IIIe siècle av. J.-C. - Ier siècle av. J.-C.), et se fit par étapes.
    Lorsqu'ils colonisèrent la Sardaigne, les Romains découvrirent les traces d'une civilisation qui les avait précédés dans l'île. Construits pendant l'âge de bronze, les nuraghi servaient de refuge ou de forteresse.
    Rome commence par s'attaquer à Carthage, cité maritime rivale, ancienne colonie phénicienne : ce fut l'occasion de mettre sur pied une marine de guerre. Ces guerres "puniques" (Poenus : Carthaginois) mettent en présence une armée de citoyens romains et une armée carthaginoise formée de nombreux mercenaires, et des chefs militaires de grande valeur, le Carthaginois Hannibal et le consul romain Scipion. Au terme d'âpres luttes et d'une humiliante invasion carthaginoise, Rome est victorieuse, Carthage est prise et rasée en 146 av. J.-C.
    Les Etats orientaux, désunis mais puissants grâce à leurs richesses, attirent les hommes politiques romains. Cette fascination et l'ambition des généraux toujours avides de gloire expliquent en partie la conquête de l'Asie faite au cours des IIe et Ier siècles av. J.-C. La Macédoine, la Grèce deviennent des provinces romaines, puis l'Egypte, enfin l'Asie Mineure. L'Asie assure la gloire des généraux Paul-Emile, Sylla et Pompée.
    En outre, à la même époque, commençait en Occident la conquête de l'Espagne. La Gaule cisalpine (plaine du Pô) est conquise également, puis la Narbonnaise pour assurer la liaison entre ces deux régions. Alors (58 av. J.-C.), veillant à son avenir politique, Jules César, proconsul de la Gaule, pays prospère, met en jeu toutes ses forces militaires pour anéantir toute résistance dans ce pays et, pour ce faire, joue sur l'opposition de certaines tribus et sur leur incapacité à s'unir.
    Pourtant, en 59, la résistance est organisée par un jeune noble, chef de la tribu arverne, Vercingétorix, qui réussit à réunir une armée de 80 000 Gaulois. Fuyant devant les Romains, pratiquant la tactique de la "terre brûlée", il tient César en échec pendant un an. Finalement, il se laisse enfermer dans Alésia, où il doit capituler en septembre 52 av. J.-C. César l'emmène à Rome et le fait figurer à son triomphe, avant de le faire étrangler, six ans plus tard.
    Les conquêtes de la République s'étendent sur le pourtour de la Méditerranée, mare nostrum (notre mer) disent les Romains. Certains pays (Gaule, Grèce) sont totalement conquis. D'autres gardent des zones de résistance (Espagne). Enfin, des secteurs de la côte nord, nord-ouest de l'Afrique, ainsi que de la côte orientale, échappent au contrôle romain.
    Les territoires soumis sont divisés en provinces  confiées à des magistrats qui pouvoir militaire et civil. Ces conquêtes permirent à Rome de s'enrichir considérablement. Le butin de guerre, les indemnités versées par les vaincus, les tributs annuels en nature ou en espèces prélevés régulièrement, les confiscations de territoires (terres, mines...) effectuées par le Sénat, constituent un transfert de richesses considérables, provenant notamment de l'Orient.
    Ces biens enrichissent le trésor public (les mines d'argent d'Espagne rapportent 250 000 deniers par jour) ou des particuliers, tels que les consuls, (Paul-Emile recueille 70 millions en or et en argent) les proconsuls ou propréteurs gouverneurs de province, qui profitent de l'année où ils sont en fonction pour s'enrichir de façon éhontée comme Verrès en Sicile, les publicains, qui ont l'affermage des impôts et réalisent d'énormes fortunes. Tous considèrent les provinces comme leur propriété personnelle. L'incapacité de la République d'établir un régime administratif à l'échelle de l'Empire est une des raisons de sa chute.
    Cet afflux de richesses bouleverse la société. A côté des anciens riches propriétaires terriens qui constituent la noblesse sénatoriale, apparaissent les "chevaliers" qui s'enrichissent par les affaires. Ce sont des "hommes nouveaux" qui réclament des responsabilités politiques.
    Les petits propriétaires terriens, qui constituent la base de l'ancienne société romaine, sont ruinés par la guerre. Au retour, ils trouvent leurs terres dévastées, abandonnées. Ils doivent emprunter pour les remettre en état, ou les vendre à bas prix pour essayer d'aller trouver du travail dans la capitale. Là, souvent au chômage, ils attendent l'aumône des riches ou de l'Etat à qui ils réclament "du pain et des jeux" pour les sortir de l'oisiveté. Rome grandit considérablement. Les esclaves de guerre s'y multiplient et assurent diverses fonctions (domestiques, lettrés, secrétaires ou pédagogues, esclaves de luxe pour distraire leurs maîtres, ouvriers).
    La vie quotidienne se modifie. La nourriture, les vêtements, le mobilier, la maison témoignent d'un luxe et d'un confort de plus en plus grands. L'influence des mœurs et de la civilisation grecque se manifeste également dans le goût nouveau de l'élite romaine pour la littérature et pour l'art.
    Les conquêtes n'ont pas profité également à tous. Deux frères, Tiberius et Caïus Gracchus (dits les Gracques) se font élire tribuns au IIIe siècle av. J.-C. pour défendre les petits propriétaires, victimes des conquêtes. La réforme agraire qu'ils proposent vise à reconstituer cette classe sociale terrienne, en demandant une plus juste répartition des terres conquises, confisquées et accaparées par les grandes familles. L'opposition de la majorité de la noblesse sénatoriale entraînera l'échec et la mort des Gracques.
    Après eux, la violence s'installe à Rome. Le régime républicain, qui confie le pouvoir civil et militaire aux mêmes mains, s'avère inadéquat à gouverner l'Empire. Les généraux victorieux cherchent à utiliser les forces armées pour servir leur ambition politique personnelle. Des affrontements très violents opposent successivement Marius et Sylla, Pompée et César, Antoine et Octave. Chacun se cherche des appuis dans le parti sénatorial homogène, ou le parti populaire, coalition de chevaliers révoltés contre les privilèges de la noblesse sénatoriale, citoyens pauvres des campagnes, plèbe urbaine...
    Cette dernière assure notamment le succès de C. Julius César. Nommé dictateur à vie, ses pouvoirs lui permirent de réaliser de profondes réformes, mais accusé de vouloir rétablir la monarchie à son profit, il est assassiné en 44 av. J.-C.
    A sa mort, les guerres civiles reprennent entre les deux généraux Antoine et Octave. Ce dernier l'emporte sur son adversaire en 31 av. J.-C. Le Sénat lui octroie alors le titre "d'Auguste" que l'on réserve aux dieux et sous lequel il est désormais désigné.
    Il maintient en apparence les institutions républicaines, mais il concentre en réalité tous les pouvoirs en sa main (pouvoirs législatif, judiciaire, militaire, financier, religieux). C'est en fait la restauration du pouvoir monarchique qui concentre les pouvoirs entre les mains d'un seul, le "Prince" (de princeps : le premier entre ses égaux); ce régime a été appelé "Principat".
    Entouré d'excellents collaborateurs (Agrippa, Mécène), Auguste (27 av. J.-C.) doué du sens du bien public, de réalisme,  de grande puissance de travail, cherche à réorganiser et à développer les territoires conquis. Il crée de nouveaux organes d'administration qui ne relèvent que de lui (bureaux, hauts fonctionnaires...) et assure la défense et la sécurité de l'Empire. Il restaure les cultes traditionnels et instaure un nouveau culte de Rome associé à celui de sa propre personne.
    Avec ses successeurs, l'Empire se consolide. Quatre dynasties règnent de 14 (date de la mort d'Auguste) à 255 (assassinat d'Alexandre Sévère, avènement de Maximin Ier d'origine barbare).
    Les Julio-Claudiens (14 à 68 ap. J.-C.), tous membres de la famille d'Auguste, ont longtemps eu une fort mauvaise réputation. Leur histoire nous est connue par des historiens latins, porte-paroles des sénateurs pleins de rancune contre les empereurs. En fait, malgré les tares psychiques indéniables de certains (Caligula, Néron), ils furent en général de bons administrateurs.
    Les Flaviens (de 69 à 96) mais surtout les Antonins (de 96 à 192) accomplirent une œuvre militaire, politique et administrative considérable. Ils achevèrent l'œuvre conquérante de leurs prédécesseurs pour assurer surtout la liaison et l'homogénéité des provinces côtières (conquête du Rhin, de la Dacie, de la Galatie, du Pont...) et renforcèrent les frontières.
    Les pouvoirs républicains traditionnels disparaissent les uns après les autres. Le Sénat, persécuté, tenu en bride, devient une sorte de conseil municipal de Rome. La centralisation et la bureaucratisation s'accentuent (création du conseil du prince). L'Empire assure ainsi aux provinces la paix, grâce à une administration saine sous la direction de fonctionnaires honnêtes et compétents. La population et la production des provinces s'accroissent. Leurs prospérité économique concurrence l'économie italienne, chaque province se spécialisant suivant ses conditions naturelles.
    La péninsule et Rome continuent à accaparer une bonne partie de leurs richesses. Les ports provinciaux sont équipés à cette intention (Boulogne, ports espagnols...) ainsi que Ostie, qui accueille les produits les plus variés (minerais de Grande-Bretagne ou d'Espagne, textiles asiatiques, céréales d'Afrique...). Cependant, se développe entre les provinces un courant commercial qui échappe totalement à l'Italie.
    L'importance politique de celles-ci grandit également. Trajan (98-117), le premier empereur provincial (Germanie), achève une évolution commencée sous César, qui tend à intégrer les provinciaux dans l'Etat romain. Avec l'empereur philosophe Marc Aurèle (161-180), il est une des figures les plus remarquables de cette période d'apogée de l'Empire romain.
    La dynastie des Sévères (193-235) marque le début d'une crise qui s'aggrave à partir de 235 ap. J.-C., date à laquelle l'empereur Alexandre Sévère est assassiné par des militaires. Une période d'anarchie militaire et de périls extérieurs s'ouvre (le Bas-Empire).
    L'empereur Dioclétien (284-305 ap. J.-C.) essaie de résoudre le problème du gouvernement d'un empire si vaste et menacé par les barbares depuis le IIe siècle ap. J.-C. Il associe quatre personnes à la direction de l'Empire et transforme le pouvoir impérial en une monarchie absolue à l'orientale, avec une étiquette stricte et un cérémonial pompeux.
    Les besoins financiers énormes entraînent la création de nouveaux impôts qui pèsent sur une population en pleine régression. Une grave crise économique s'annonce, qui nécessite le contrôle de l'Etat sur les prix et les industries. Le développement récent du christianisme oblige encore Dioclétien à intervenir sur le plan religieux (persécution des chrétiens).
    Ses successeurs doivent faire face à tous les problèmes. Constantin (306-337), décrète la liberté de tous les cultes, délaisse Rome et fonde Constantinople. L'empereur Théodose fait du christianisme la religion officielle de l'Empire qu'il divise cette fois définitivement en deux (Orient-Occident). Chacun de ces Empires a désormais son histoire propre. L'Empire d'Occident s'effondre en 476 ap. J.-C., à la suite de la prise de Rome par les barbares. Les insignes impériaux sont renvoyés à Constantinople. L'Empire d'Orient subsistera pour sa part jusqu'au milieu du XVe siècle.
    L'héritage romain transmis aux régions du bassin méditerranéen fut considérable. Rome ayant su à la fois imposer sa propre civilisation aux pays conquis, et rester ouverte aux apports originaux de ces peuples.